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Tourrettes – Peille – Grasse AR
20 avril 2017, Tourrettes-sur-Loup, Peille, Grasse et retour, ligne directe par le sud
trace du vol http://parapente.ffvl.fr/cfd/liste/2016/vol/20211529
C’était le 20 août 2015, Roquebrune – Gourdon – Roquebrune : l’aller-retour de mes rêves, enchaînant par une ligne directe les plus beaux balcons du 06 pour contempler la Méditerranée : Mont Agel, Mont Macaron, Mont Chauve, Baou de la Gaude, Baou de Saint-Jeannet, Tourrettes, Courmette.
Naturellement, la petite entorse à l’aller, en traversant le Var par Carros, cassait un peu la rectitude de la trace. Cela me laissait un peu de travail pour plus tard, mais je savais qu’il faudrait des conditions exceptionnelles pour faire plus direct, avec la transition Mont Chauve > Baou de la Gaude !
Le mercredi 19 avril, Benoît Outters fait un super vol de puis Tourrettes jusqu’à Menton avec un retour en passant au nord par le Mont-Vial. Le vent et les fortes brises l’ont éjecté dans les montagnes avant qu’un mur de Sud ne le mette KO au col de Bleine. Et cela dans des conditions impressionnantes à l’écouter ! Nous convenons donc de nous rappeler le lendemain matin pour aller voler.
Un coup de fil et nous nous retrouvons à Tourrettes, également avec Arthur, le p’tit jeune qui monte, pour profiter de ce ciel généreux, s’il nous fait l’honneur d’être encore en superbes conditions. Je pense à reproduire et à boucler ce parcours inachevé que Benoît a fait la veille, il m’a bien fait baver. Evidemment, si les conditions sont propices au retour direct par le sud avec cette fameuse transition directe Mont Chauve > Baou de la Gaude, mon choix ne fera guère de doûte !
Loïc Diaz et Stéphane Garin, l’assistant de Benoit pour la Xalps 2017 nous rejoignent.
Je décolle en premier, vers 11h et centre directement le thermique sans devoir bricoler : j’arrive en quelques minutes jusqu’à 1800 ! C’est bien parti.
Cela sent bon la journée historique, il faut en profiter pour faire un gros gros truc.
Je peine à me positionner sous le nuage vers Vence, Benoît et Arthur sont en l’air et semblent bâcler le plein pour me rejoindre.
Je poursuis au large de Saint-Jeannet où je bricole difficilement un petit vario tandis que les 2 jeunes derrière semblent avoir trouvé un vrai noyau. Je décide de rester dans mon petit truc sans jouer à la coucourse ou trop me soucier d’eux. L’ascendance rend son dernier souffle et je suis indécis sur le fait de lancer ma transition vers le Mont Chauve. En effet, comme la veille et comme les prévisions l’indiquaient le vent est de la partie, comme pour nous enseigner que dans notre 06, rien ne se fait gratuitement. Je me lance, depuis Saint Jeannet à 1750, contré par du Nord-Est.
Je vois Benoit me doubler par le bas, quelques centaines de mètres plus bas, il semble engager lui aussi la transition. Optimiste ou aguerri comme jamais avec un compas infaillible dans l’oeil ? Optimiste il était, il fait demi-tour assez vite pour revoir sa copie et reprendre un ascenseur avec Arthur.
A l’arrivée vers le Mont-Chauve ma vitesse s’effondre un peu plus. Par ces journées ventées et copieusement instables, il suffit de 2 thermiques au vent pour se trouver avec l’horrible impression de ne plus avancer et/ou tomber du ciel, positionné dans un venturi invisible et décourageant. Finalement, ce vent de face me ramène avant l’heure tous les thermiques de la crête qui descend du Mont Chauve vers Nice. Je monte tranquillement, c’est large. Journée royale, vous dis-je ! Et quelle vue sur Nice !
(en haut à droite l’icone « focus » permet de sélectionner le pilote à suivre)
Au Mont Macaron une large zone ascendante me cueille. Je cesse d’enrouler vers 1900 pour éviter la TMA et je prends d’emblée une mauvaise ligne vers Peille. C’est encore du vent qui me scotche. Je fais rapidement demi-tour pour repartir d’un peu plus haut et surtout pour lancer la transition sur de bons rails, dans une direction porteuse.
Là encore, je suis bien contré et je ne vais pas pouvoir chevaucher directement les sommets pour passer éventuellement sur Gorbio. Je commence à me dire que le temps tourne avec ces vitesses d’escargot et que, sans même parler du vent qui doit passer S ou SO, de telles conditions hyper généreuses dans le massif coiffé par du Nord frais et modéré vont nous donner très rapidement une très forte brise dans le Var. Les fortes brises étaient d’après Benoit un fait notable de la veille. Sentant Peille un peu piégeux à cette heure, je préfère me positionner au milieu de la vallée pour ramasser ce qui pourrait sortir de la crête de Peillon et du col de Saint Pancrace : et bingo, je refais 1800.
J’aurais tout loisir d’aller à Menton mais cela me mettrait dans un timing qui promettrait :
- soit un retour dantesque et sportif par Carros vers le Baou de la Gaude
- soit un retour par Carros puis Coursegoules
- soit un retour/détour musclé par le Nord comme Benoit la veille
Je préfère profiter de mon plein pour faire demi-tour avec la certitude d’être dans peu de temps assez haut et pas trop décalé au dessus du Mont-Chauve. Vu comme j’étais contré à l’aller je me dis qu’avec un énorme plaf et un peu de vent favorable, il doit être possible de faire un retour direct sur le Baou de la Gaude. C’est exactement LE gros truc que j’attendais de la journée. Un truc comme j’aime, une performance insignifiante pour 99% des pilotes, mais pour moi il n’y a pas plus délicieux.
C’est donc un demi-tour au plaf que j’effectue.
Video qui déchire : le vol de Benoit la veille, jolie vue sur Nice
Je pensais être immédiatement poussé autant que j’ai été contré à l’aller, mais me voilà bien déçu : d’après mes vitesses, j’ai environ 10 km/h de vent dans la face sur la trajectoire que j’emprunte vers le Macaron. J’essaie de dialoguer avec Arthur, j’apprends qu’ils vont sur Peille. Yes je les vois.
Arrivé au Macaron, je me repositionne dans la large zone ascendante prise à l’aller et en étant patient, je fini en taquinant la TMA. Je suis encore à 1700 en survolant le Mont Chauve alors je décide de tenter de passer en direct, malgré la composante de SO à 10-15 km/h. Je commence à avoir de bons repères tant sur l’aérologie du jour que sur la glisse de ma nouvelle aile, je pense qu’avec un peu de réussite ensemble on peut le faire !!!
C’est parti. Psychologiquement, je passe par un peu tous les états. Au début je trouve que ma trajectoire n’est pas vraiment porteuse et que le chemin est long. J’aimerais gagner le maximum de terrain sur la brise pour me retrouver bien placé de l’autre coté de la vallée. Mais je dois avant tout couvrir toute la distance de la transition et donc aller au plus court.
J’y crois jusqu’au survol du fleuve. Dès lors, mes impressions se précisent et le replat certainement va m’empêcher de taper au vent du Baou de la Gaude. Le vent de Sud-Ouest est toujours présent, presque plus sensible que la brise sur mes vitesses. Je suis trop short et je suis contré par les éléments, c’est la déprime. Je m’en voudrais presque d’avoir tenté le pari alors que j’aurais pu rentrer par Carros.
Je n’ai plus d’autre choix que de prendre le cap des premiers reliefs venus, en espérant, en priant, que le replat ou les pentes du bas donnent. Je ne connais pas très bien ces basses couches, mais j’ai souvent constaté que plus haut, quand la brise est à un bon régime il ne fait pas bon être en vallée sans l’appui des reliefs principaux.
En fait, pour le dire plus simplement, j’espère que la brise n’est pas encore assez forte pour tout emporter sur son passage, y compris moi.
L’espoir revient au survol des pentes du bas. Je zérote. Puis je prends du positif, je traverse le large thermique un peu mollasson qui vient des champs déventés du replat. Il y a une quantité énorme d’air chaud qui ne demande qu’à s’élever ici, et elle y arrive de manière homogène, malgré le vent et la brise du Var qui monte doucement en puissance. Comme souvent en enroulant depuis très bas, j’arrive à garder le thermique malgré sa dérive et sa faiblesse.
J’annonce triomphalement ma victoire à la radio par un enthousiaste cri : « Mont-Chauve – Baou de la Gaude en direct yes yes yes ! » C’est peut-être un détail pour eux, mais pour moi ça veut dire beaucoup (France Gall).
Je me repositionne plusieurs fois au vent en retrouvant des thermiques pour regagner une altitude confortable digne de journées historiques ! Dès lors, je n’aurais plus qu’à être consciencieux sur les plafonds et concentré sur les séquence de vol droit accéléré pour gérer et vaincre patiemment le vent de Sud-Ouest, bien pénible jusqu’à Courmette.
J’irai ensuite facilement jusqu’à Grasse et je me reposerai à Tourrettes d’où je suis parti, jamais sous les 1300:) Je ne croiserai qu’une aile à Gourdon.
Quelle journée exceptionnelle !