Nice – Thorame AR

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Une journée prometteuse s’annonce pour Samedi. Un petit bol d’air n’est pas de refus. J’irais même volontiers faire un combo sur 2 jours, je mets quoi dormir dans le sac.

J’appelle Benoît qui préfère gunner avec le gratin à Gourdon. Peu motivé par les possibilités offertes par le lieu et par les perches à selfies, je reste sur l’envie de me faire un petit départ tranquilos, avec un déco pas loin de Nice.

J’ai bien failli craquer pour les Cabanelles à Roquebrune, pour tout dire, j’ai pris leur route. Mais les embouteillages matinaux ainsi que la peur d’être au plaf à 9h30 en devant me jeter sur des reliefs lointains et moins propices m’ont mis sur le chemin du Mont-Chauve.

J’y suis tôt, et à peine la marche d’approche terminée arrive l’indéboulonnable Régis. Régis est adorable et… bavard. Comme c’est mon aîné, je n’ose pas lui dire que j’ai besoin de me vider la tête et de m’imprégner un peu des conditions. La dernière fois, à ressentir le besoin de fuir, j’ai failli faire un tas en décollant trop tôt.

L’heure tourne, ça tarde à se mettre en place. Régis me laisse enfin seul, comme s’il avait fini par lire dans mes pensées.

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Après de multiples élans contenus, je finis par décoller. Le timing est encore assez correct.

C’est un déco difficile, avec l’aile déventée sur la route et du coup cette fois il n’y a personne pour la tenir. Les suspentes sont sur une végétation plus dense que jamais. Mes pieds sont calés sur une pente raide et instable. Go ! L’aile monte difficilement. J’ai déjà cramé 2-3 précieux mètres de pente. J’ai une seconde pour me décider : bon cap & encore assez haut pour passer les arbres !!! Yessss je cours et ça fini par voler !!! C’est bon ça !!!

J’étais sceptique sur la stabilité et je sors assez facilement un bon 1500 d’entrée, dans un thermique que j’ai cru 1000 fois s’essouffler.

Mais il y a un « mais ». Il y a beaucoup de Nord et le Var est encore sous un régime catabatique . Les fumées de la vallée du Var, celles de Levens, celles vers Bouillon sont autant de signes inquiétants. Je n’arrive pas à attraper une ligne porteuse et ma finesse/sol contre un vent conséquent est sans surprise, catastrophique. Mes 1500 fondent comme peau de chagrin. Je ne trouve pas grand chose à Aspremont. Je continue et je dois, avant de traverser le fleuve, insister dans des trucs mouvementés, sous le vent. A force d’acharnement, 50-100m sont grapillés et l’essentiel est, je pense, sauvé.

Je poursuis et peux taper au dessus de mon éperon magique entre Var et Esteron. Je suis au sommet d’une petite butte qui me permet de ramasser tout ce qui vient quelle que soit la direction du vent. Et bon sang, qu’elle est illisible ici

J’avant-fuite et après maintes déceptions je commence à sérieusement déchanter au dessus de Bonson où rien ne monte, je finis à hauteur du village face aux spectateurs… Cela va se finir en tas, cela va se finir en tas…. Finalement la logique me conduit à prendre franchement à l’Est le thermodynamique de la brise catabatique de la Vésubie, orientée pile en face des plus belles pentes du village… yessssss ça marche ! Quel privilège d’avoir pu faire cela ! De l’air arrive enfin à monter nos 95 kgs, je n’y croyais plus depuis le temps. Les conditions restent néanmoins faiblardes, même une fois l’arrête regagnée.

Je dois me résoudre à continuer bas. Il y a des situations où l’on ne sait pas si on vole comme un sac en étant impatient ou si l’on marche avec brio sur des oeufs avec le peu qui nous est offert. Revest-les-Roches, par le bas, c’est fait ! Si ça recommence à plomber doucement ici, je serai bien dans la merde, me dis-je… heureusement j’arrive à me maintenir et je trouve de quoi enrouler.

En haut c’est pas dégueu. J’adore cette montée depuis le fond de vallée vers le sommet du Mont-Vial, ça se termine toujours par du lourd et c’est encore le cas. Mais, d’habitude, la montée en puissance est progressive et les marges augmentent également à chaque étape. Ce coup-ci, les bonnes conditions étaient un peu soudaines, j’ai du ramer tout le long pour finir par remonter les falaises. Ces moments forts comptent, mais ils coûtent.

Je quitte vers 1700 et chemine en modulant mes vitesses et mes trajectoires pour éviter la TMA à 2000. Quel coin ! Quelle vue ! Je ne m’en lasse pas. L’air est très sec, la lumière est fabuleuse. On sent un peu le Nord-Est mais ça va. Après le col au niveau de Puget-Theniers, je commence à taquiner des altitudes un peu plus importantes, le vent devient plus que sensible. Ces gradients me tabassent bien et une fois les thermiques quittés, ça plombe.

Je ne sais pas encore exactement que faire de ce vol, je continue vers l’Ouest. Avant Briançonnet, me voici dans une espèce de zone infecte entre Nord-Ouest et Nord-Est. Bien plus haut, hors convection, il y a une superbe ligne brossée, matérialisée jusqu’au Coyer. Etrange.

Les thermiques sont vraiment dégueux à partir de 2500, en plus ça porte peu. Je me positionne néanmoins sans trop de mal sur le Crémon et là encore j’ai du mal à comprendre. Sud quelquefois en bas et assurément [ NE et/ou N et/ou NO ] en haut. Je note ensuite que l’Issole est en Nord.

Tout cela commence à me gaver. Je ne sais pas trop quoi faire. J’adopte un état d’esprit aventurier-bivouaqueur mais ça ne marche pas. Je n’ai pas trop envie de me faire chier posé sur une montagne ou d’aller en vallée dans un coin sinistre avec mon sac à trimbaler. J’ai envie de me taper une bière et un bon repas, de prendre une douche et de profiter du beau temps et de la plage demain. En gros j’ai mon compte, oui, limite ça me gonfle presque de voler, c’est fort et surtout, je ne comprends pas grand chose.

Aller, on va essayer de rentrer, la perspective d’une revanche sur une certaine erreur commise à Caussol il y a quelques temps me motive soudain.

Je continue un petit peu au nord et zou, cassos.

J’arrive à Cotes-Longues et poursuivre ne me motive pas du tout. Je fais un demi-tour. Avec un peu de réussite je bouclerai et je me poserai assez tôt pour ne pas avoir eu l’impression de n’avoir fait que voler.

Sur le retour un voile s’installe, c’est mou sur la crête des Serres.

Pour passer sur la Bernarde, sûr de mon coup vu le Nord présent au Pic de Chamatte, je me précipite un peu. Aussitôt parti, bas, ma finesse tombe et je regrette ma précipitation, je n’avais pas prévu de dégueuler autant.

Je passe quand même mais j’ai un peu douté au dessus de ces forêts piégeuses et je m’en suis un peu voulu. Je tenais à tout faire en maîtrisant mon sujet et je n’ai pu m’empêcher de jouer.

3200 avant Briançonnet, ça devient sympa. Merci au voile, cela devient très plaisant de voler ! En plus, j’ai tout le temps qu’il faut pour faire le touriste !!! Mon point de vue change un peu, j’apprécie ces conditions exceptionnelles.

Pris au jeu du vol clean et déclarable, avec mon instrument Skytraxx pourri et ses dessins d’espaces aériens minimalistes, je ne prends pas le risque de faire fructifier mes belles altitudes pour joindre Saint-Vallier.

J’arrive donc sur la crête de Bleine, il y a du gaz à cramer…

A Fourneuby, je dois faire longuement les oreilles pour rester dans les clous, ce faisant je perds la conflu et je passe sur Greo assez bas en devant suffoquer dans les basses couches.

Transitant sur Courmes, je suis flatté de rentrer au Puy de Tourettes sans un virage, ça bipote tout le long et du coup ça pénètre super bien. Maintenant la réussite du challenge me semble acquise.

Je survole Tourettes et Loïc qui vole.

La bière m’appelle. Je n’ai pas trop d’intérêt à de passer du temps à trouver un plaf improbable sur le Baou de la Gaude pour ressortir au Mont-Chauve au dessus du déco.

Au survol de Colomars, je me rends compte que seulement 100-200m de plus m’auraient donné ma chance pour le Mont-Chauve.

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Je vais comme prévu aller me poser au pont de la Manda, Je me délecte encore les yeux et j’appelle Jean-Paul pour voir s’il peut me remonter. J’appelle aussi mon pote Fabien qui travaille juste en dessous pour qu’il jette un oeil en l’air. Et à ce moment, une énorme minasse pile à l’aplomb du fleuve me fait vasciller, pas le temps de raccrocher, j’enroule ce truc, il est trop beau !!! En quelques minutes me voilà reperché et je décide d’aller me poser chez Dgilou pour la binouse. C’est superbe et magique de glider entre Est et Ouest, de remonter le Var. Une tâche qui fût si laborieuse ce matin !

J’arrive bas sur l’ « éperon des minables » entre Var et Esteron, maintenant, il ne va plus faire des siennes comme ce matin, il ne va pouvoir que me remonter.

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Comme pour bien le narguer, je le surfe 2-3 minutes et le snobe pour aller me poser.

Bien méritée, la binouse m’attend chez Dgilou et Pilou nous rejoint.

Merci à Pilou pour la remontée intégrale à ma voiture. La classe.