Sospel – St-André – Mont-Dauphin

Mars 2014, le premier bon gros vol de l’année. Une journée de rêve avec des conditions parfaites. Le risque de ne pas choisir du tout cuit paie et m’offre un de mes plus beaux vols…

De Sospel à Embrun un jour magique de Mars !

Le 14 mars 2014, 170 km

http://www.xcontest.org/world/en/flights/detail:pascamax/14.3.2014/09:56

Je rentre à la maison après cette fantastique journée de parapente, il est 1h30 du matin, je roule sur cette grande artère épousant la baie de Nice : la promenade des Anglais. Les feux deviennent systématiquement verts 50m avant mon arrivée. Cela a un petit air magique, tout comme ce qui c’est passé en l’air ce 14 mars 2014.

Tout s’annonce de la meilleure manière pour voler depuis Fourneuby, c’est sensé être fumant dans le secteur Bleine-Moustiers-Dormillouse.

C’est attractif certes, mais pourquoi ne pas prendre un peu de recul sur cette quête monotone du meilleur site au meilleur moment ? Sur cette recherche systématique de la meilleure promesse kilométrique ? Sur cette tendance stéréotypée d’en vouloir pour son argent ?

  • Et si c’était simplement une journée idéale pour voler en parapente ? Simplement, se faire plaisir en évoluant dans l’inconnu ?
  • Et si je partais enfin à la découverte de Lucéram et de Coaraze comme j’en ai toujours révé ?
  • Et si tout cela marchait bien, ça pourrait même finir loin cette affaire !

C’est souvent dans les petit détails logistiques que se finalise (ou pas) ce genre de résolution.
Grâce à la présence de Max, Vincent, Raymond, Philippe, Salva et Cyril, les soucis d’un vol sans retour avec la voiture au sommet ne vont pas infléchir ma décision.

Je n’ai pas trop confiance en la Lavina malgré l’assurance des connaisseurs, je préfère mon Monte Grosso, son herbe,  sa vue panoramique, son calme dépaysant. Nous y allons avec Max et Cyril.

Au loin, la Lavina semble laborieuse à certains. Chez nous, Cyril le rookie décolle et semble tenir.

11h00 Let’s go !

Ca monte un peu en décalant bien. La tendance Est est bien au rendez. Je ne m’acharne pas pour mieux dompter les ascendances du Mont Gros, j’assume ma médiocrité et je décide de passer à la baisse des Canons.
Idem là bas, j’en ai assez, je file. Je traverse les gorges de la Bevera.

Ce moment est d’habitude piquant et savoureux – elles sont sacrément impressionnantes ces gorges – mais vu ce qui m’attends, je suis totalement hermétique. Je pense déjà à l’accueil de l’autre coté et au beau plaf qu’il faudra absolument faire pour s’engager sereinement dans l’inconnu.

Ouf, ça monte sans difficulté sur la crête de Mandine. J’arrive vers les 2000, Lucéram et Coaraze, me voilà ! Je vais me placer sur les crêtes au sud de Peira Cava. C’est un joyeux bordel topographique avant le Férion.

Quel plaisir de survoler ces coins. Il faut les visiter du bas pour comprendre ! Ca remonte un peu au col Saint-Roch et je décide de viser le Férion plutôt que la Madone d’Utelle.

J’arrive un peu sous le sommet en face est. La brise me contre mais j’arrive à me hisser au dessus des cretes. Je me replace sur la cabane du sommet et je refais pas loin de 2000 avec la bonne surprise de voir un parapente blanc arriver. C’est soit Raymond, soit Vincent !

Je me jette vers le Vial en gardant une trajectoire me permettant éventuellement de me diriger vers Bonson au dernier moment, selon ma perte d’altitude et mon feeling.

J’arrive dans les pentes sud du Vial, avec comme atterrissage de secours un chemin en bas de pente. Ma religion me dicte que les gorges du Var sont infréquentables, quelle que soit l’heure. Je bricole avec soin et me voilà au dessus du sommet. Toujours impressionnant ce coin !

Superbe premiere section de vol ! Yesssssssssssssssssss ! Magnifique. Je repense aux premiers parapentistes qui ont du faire ça ! Respect ! Et l’impression de rentrer dans un club très select.

Je progresse ensuite tranquilement en longeant les crêtes vers  la difficulté de la Penne où le terrain s’aplatit. Ne pas sombrer par ici, jamais. J’essaie de faire un plaf à chaque occasion, mais je n’y arrive pas. Je vois Raymond sortir du Vial !!! Yes !

Sans vraiment tout ce qu’il faut je me jette sur la Penne et les avant reliefs donnent suffisemment. C’est laborieux et je contemple Raymond faire un beau plaf et me rattraper ! Chapeau ! Les compétences acquises dans le bocal de Roquebrune sont transférées sur un itinéraire bien tricky !!!

Nous progressons ensemble jusqu’à Avenos. Je le suis sur la crete quand je vois son aile cabrer dans une énorme minasse. Je connais bien ce thermique ! J’ai l’impression d’entendre son vario hurler ! J’enroule dans du petit pour connecter un peu plus haut le noyau.

Sans radio, on ne communique pas et on se perd bêtement au niveau du Vallon du Passé . J’ai beau chercher mon Raymond, je ne le vois plus.

J’arrive sur Briançonnet vers 14h, la vraie fête va commencer.
Les cums au loin sur le Teillon m’ont mis l’eau à la bouche depuis pas mal de temps !

Un 2800 avec 1 minute mythique d’un vissage parfait de + 5 sans aucun mouvement parasite, le tout avec un son de vario régulissime ! Pas mal !

C’est donc facilement que je me retrouve au Crémon où je refais 2800 ! Un nuage plus à l’ouest m’invite à monter encore plus haut mais je décide de foncer direct vers le Chalvet sans craindre les basses couches car c’est la fête !

J’étais évidemment optimiste et je dois enrouler des trucs sous le vent de Courchons. Heureusement des oiseaux m’indiquent le thermique officiel au sud de Saint André et je fais 2200 ! C’est la fête vous dis-je !

Sur le Chalvet en direction des antennes je ne peux m’empècher de monter en gamme : on se remet d’abord à 2800.

Puis 3400 aux antennes !

Je glide direct jusqu’à Carton avec ça ! En frolant les cretes enneigées de costes Longues j’adore ! Je retrouve Jean-Paul qui doit venir de Fourneuby via Moustiers.

On arrive ensemble sur le Tromas, je suis plus haut et je ne persévère pas en pensant trouver un truc plus clean à enrouler plus loin.  Sur l’éperon qui suit (Tête de Bau) ça marche bien avec l’aide d’un oiseau pour le recentrage au vent en Nord-Est. C’est super enneigé avant l’Aiguillette et parole de vieux brisquard il faut mieux prendre un peu d’air.

La suite est parfaite, avec une Blanche qui donne suffisamment. Je fais encore 3000 à Dormillouse en me disant que l’on est pas en été. J’arrive au Morgon où la tendance est franchement nord.  Je pars de 2800 vers le Guillaume.

Il commence à faire tard et j’aurais bien aimé passr par les Orres mais ça y sent trop la neige. Les faces Ouest de la Durance me semblent plus propices.

Tant pis c’est le Mont Guillaume où j’ai enfin un contact radio. Benoit Outters est au Mont Guillaume au dessus de moi !

J’ai soudainement compris : la radio vendue par un certain XXXXX est en fait un jouet pour enfant. Je ne capte que les gens qui sont à moins d’un kilomètre… super utile !

Benoit avec ces 200m d’avance part vers l’est par les faces Est.  La falaise vers Serre-Buzard se noie petit à petit dans l’ombre.

Je m’applique à plafer pour traverser la Durance et trouver le soleil.  A l’occasion de cette transition, je vois Jean-Paul sur les mêmes faces très bas et je le vois finir par se poser. Il a du faire un direct du Morgon.

J’arrive à Saint-André-d’Embrun et la déconcentration me frappe. Au lieu de tout donner pour essayer de me remonter au sommet, au son du vario je juge l’aérologie moribonde sans prendre de repère et je me jette dans le glide final en direction du Mont-Dauphin. Quel regret en regardant ma trace; je montais. Qui sait ce qu’il aurait été possible de faire du haut de cette montagne ? Enfin, l’essentiel n’est pas là, on n’est pas à 10 km près.

Quelle journée de fou !!! Tout le monde c’est bien gavé. Il y en a une seule par an où le parapente est aussi facile !

Merci à Philippe qui non content d’avoir fait un super vol à fait la récup jusqu’à Gap.

Saint-André – Ecrins – Oisans – Maurienne

Juillet 2013 au départ de St André, une journée de cross assez médiocre et laborieuse m’a permis d’entrer par la petite porte au coeur du massif des Ecrins. Ce que j’y ai vu était grandiose…

http://parapente.ffvl.fr/cfd/liste/2012/vol/20132843

Nous sommes partis remontés à bloc avec JPT pour cette journée annoncée sèche et Sud après des semaines de conditions orageuses.
Nous arrivons à partager notre enthousiasme avec Tom, Dgilou et Victor.

Bleine semblant sur les prévisions un petit peu aléatoire avec de l’air marin humide, nous bétonnons le plan avec un départ de Saint-André. On perd 2 heures de vol et 30 km sur la journée idéale mais bon…

Malheur ! C’est Ouest et les cums poussent bien en montagne. On ne décolle que peu avant midi du Chalvet.
Consolation, ça porte bien, je ne perds pas trop de temps.

Le plaf est bas et le flux d’ouest modéré me fait choisir le Cheval Blanc… je vole pépère sur Cheval-Blanc Carton et Lachaux. J’observe surtout les nuages et analyse les opportunités de vol. Pas facile, tout change assez vite avec des gonflements-dégonflements.

Le gros truc qui ombrageait la Blanche est de moins en moins impressionnant.
La conflu à Dormillouse me semble sérieuse mais elle ombrage à son tour une large zone et peine à me tirer. Aucun CB nulle part, j’ai le temps…

Le plaf est médiocre sur le Morgon mais :
le Viso est visible (avec plaf bas en italie), les Ecrins sont très peu ennuagés. Un cum prend le sommet de la Barre des Ecrins, ce qui montre à l’optimiste que je suis que le plaf n’est pas si mal. C’est bien bleu à l’ouest.

Un Morgon >Guillaume est donc la suite logique.
Une fois au Guillaume je suis sur 3 options qui sont Viso (mais ça me semble potentiellement une impasse avec des plafs bas et humides en Italie) Grenoble par l’ouest (mais ca va etre difficile de se mettre au Piolit et je ne suis pas sûr que les brises vers Corps soient Sud tant le flux rencontré jusqu’alors est davantage de l’Ouest que le Sud des prévisions) et… 3eme option : les Ecrins (aucune objection et une grosse envie) !!!

Je croise une Niviuk qui se fait bien brasser en essayant de remonter la Durance par les cretes au nord du Guillaume.. je suis un peu ça de haut, il va vraiment pas vite vers l’Ouest… ça me conforte dans mon option.

Après avoir constaté mon impuissance à enrouler un thermique dans 30kmh, j’arrive à voler deux tours dans un truc un peu plus fort qui décalle à max. Yes ! J’arrive à me faufiler en passant de justesse au Nord. C’est parti pour de la nouveauté et de la nouveauté grandiose !

Je ne vais pas développer l’itinéraire intra-massif. Certainement un des plus beaux moments de parapente que l’on puisse vivre en France.

Un paysage de dingue avec arrêtes de type haute montagne, des glaciers, le tout dans un isolement qui donne à la fois du piquant et de la solanélité : imaginez la jubilation et  bonheur !!! C’est l’AVENTURE !

Quelques infos en faisant court :

– je reste quand même très concentré sur l’objectif de voler juste et bien et je fais très très attention quand je suis à proximité du relief

– les conditions sont difficiles avec du vent 15-25kmh OSO, ça décale bien mais ce n’est pas ce que j’appellerais malsain.

– les thermiques sont dans l’ensemble rares et certains sont même relativement mous, c’est bien pour souffler mais ça rend l’itinéraire assez retors et pas gagné.

– au coeur du massif aux plus hautes altitudes, les thermiques deviennent hardcore avec beaucoup de vent, m’obligeant à serrer fermement les virages dans la branche vent arrière pour ne pas me faire décaller

– j’étais super impressionné de voler au dessus et contre ces crêtes majestueuses et désertes, ces montagnes mythiques.

– je n’ai pas joué à essayer à tout prix de faire les sommets, je reste dans un optique cross et je souhaite avancer vers le Nord, je me sens plus à l’aise un peu au large. Cela me permet de contempler et de savourer pleinement et aussi sereinement que possible ces instants tant attendus.

– cela ne se passe pas trop mal question navigation, j’avais pas mal préparé sur Google Earth donc ce n’était pas un labyrinthe

Regardez le vol de Guigui, avec des conditions un peu plus généreuses :

Ensuite je vais plonger vers l’ouest (les 2 Alpes) car ce que je vois au nord de la Meige me semble un peu moins propice (pentes douces replats et herbe).

Je quitte donc les Ecrins avec pour cadeau un glacier énormissime (glacier de la Selle) et non loin, une grotte XXXXL. Magnifique !
Un plaf d’adieu a 4000 et un bon gros glide poussé par du SO. Je croyais quitter les Ecrins pour le Taillefer… mais pas du tout 😉  Je suis juste un pinpin perdu après les Ecrins…

En guise de Chamrousse c’est… Huez 🙂

J’arrive vers Huez avec brise soutenue de face, je me précipite un peu et je dois porter ma croix pour remonter sur les hauts reliefs.

Une fois aux crêtes, les gros cables des téléphériques et la luminosité difficile (avec un soleil devenant bas et de surcroit de face) m’incitent à glider avec le vent plutôt que de repartir sur un franchissement de vallée pour aller vers le Nord.

Enormous ! Je me retape donc une superbe session de belle montagne avec les glaciers et les lacs à moitié dégelés du massif des Grandes Rousses… Le tout poussé à 55 kmh avec une finesse infinie… c’est superbe.

Je n’ai qu’à laisser flotter mon aile dans cet air huileux et à contempler tout cela, encore et encore.

Du Col de la Croix de Fer, je reconnais loin au sud le Tabor que l’on avait survolé à 4000 en 2009 avec Fred Nabet.

J’essaierais d’allonger au max le vol en remontant la Maurienne mais le final en restit poussé par la brise que je planifiais se heurte après Saint-Michel-de-Maurienne à du catabatique….

Il est plus de 20h quand le rêve se termine, c’était superbe !

Saint-André – Briançon – Courchevel

Première incursion dans les Alpes du Nord !

Ma première vraie grosse distance libre vers le nord, partagée avec Fred Nabet.

http://parapente.ffvl.fr/cfd/liste/2008/vol/20083072

Préparatifs…

On se retrouve la veille au soir avec JPT et Bruno autour d’un bon repas à Saint-André, puis c’est le lendemain matin sur le parking du terrain d’atterrissage que nous sommes rejoints par Parapentor, Lolo De Sospel, Rom, Gilles de Gourdon et des pilotes d’Embrun (Christophe & co) et de Gap (Fred). On s’organise pour monter. Sur le trajet, avec JPT, nous sommes particulièrement affairés à questionner Christophe que l’on a kidnappé dans notre navette pour qu’il nous livre tous les secrets du passage clef de Dormillouse vers Grenoble.

Ensuite chacun se prépare tranquillement dans une ambiance sympathique. Je sais que ça va être une journée terrible et que je n’hésiterai pas à aller au Nord sans penser au retour. Les objectifs sont Grenoble ou Briançon selon la tendance, j’ai déjà étudié quelques vols réalisés sur ces itinéraires et je me suis posé à Embrun il y a 2 ans presque jour pour jour, aprés avoir renoncé à me battre dans la forte brise au Mont-Guillaume. Je reviens 2 ans plus tard avec beaucoup plus d’expérience pour la revanche…

Début de vol…

Parapentor décolle dans les premiers puis les décos s’enchaînent alors que l’aérologie monte doucement, doucement en puissance. JPT, mon meilleur allié pour la distance vers le Nord décolle et parle en radio de problèmes d’accélérateur.

Je décolle à mon tour et avance avec précaution vers les antennes, sans pour autant essayer de faire un plaf vu que personne n’est bien haut. Je raccroche un peu bas les pentes des antennes mais les appuis sont plutôt bons, pas de suée ici.

Ensuite on se retrouve à 5 puis 10 pilotes à essayer de prendre de l’altitude aux antennes. Ca décale et ça veut pas trop monter…. J’arrive à prendre un ascenseur un peu au Nord qui me décale bigrement vers l’Est, je monte plus vite que la grappe qui prend péniblement le thermique plus conventionnel, en plus je dérive à peu prés dans la bonne direction.

Suite à cela, je survole la crête de Lambruisse sans rencontrer d’ascendance et je me retrouve avec Rom et Christophe à son extrémité Nord, au dessus d’une face minérale orientée Sud-Ouest. Nous peinons pour monter sans nous faire trop décaler vers l’Est. J’envie Christophe et sa Boom, à chaque portion où il remonte au vent on sent une sacrée pénétration de sa machine. Finalement une fois à une hauteur raisonnable (+ de 2500) je décide de passer par Cheval Blanc.

Ce que j’aime bien dans le coin est qu’il n’y a pas trop de verrou à passer, de thermique obligatoire et qu’on arrive plus vite en Pays de Bléone où ça laisse du gaz pour faire se refaire, même bas, avec des appuis en brise. Bon c’est aussi une question d’habitude… et surtout, je l’avoue, je ne me lasse pas du paysage verdoyant sur presque 360° coincé entre Sud de Carton, Est de Boule et Nord de Cheval Blanc!!!

Durant la transition vers ce Cheval Blanc, je vois JPT se poser au pied de Lambruisse… je suis vraiment peiné, car c’est avec lui qu’on s’est préparé à la distance libre vers le Nord… Enfin tant pis… ça me motive pour être à la hauteur et faire aussi bien que ce qu’il aurait fait.

Bon bien sûr pour l’instant il faut déjà arriver au Cheval Blanc! Ma vitesse et mon taux de chute se dégradent critiquement durant la transition et quand j’arrive au relief je comprends que je suis particulièrement contré et sous le vent. J’avance et tenant mon aile du mieux que je peux et quand le relief s’oriente plus à l’Ouest puis au Nord- Ouest ça devient bien plus sain. A hauteur de crête je vise le milieu de Carton et à michemin je trouve le thermique du cirque. Il est aujourd’hui un peu faiblard mais comme des fois il se montre très capricieux, ce n’est pas plus mal. En tout cas, il me permet de monter en contemplant encore une fois mon paysage hallucinant sur 360° : un plaisir d’enrouler !!!

J’entends à la radio en enroulant Rom annoncer 3200 sur Côte Longue, finalement je fais plus de 2500 sur Carton et me retrouve en avance sur lui. Au loin on devine l’homme silencieux du jour sur le Tromas, l’impressionnant Parapentor sous une Aspen 2 XXL avec une autre aile pas loin. Depuis le début du vol, il ne répond à aucun de nos appels, le deviner au loin calme un petit soucis qui émergeait doucement dans un coin de ma tête.

Finalement je vais retrouver Parapentor et Fred de Gap à Dormillouse. Après avoir vu leur perte d’altitude en arrivant au fort je déroge à la règle de ne pas enrouler sur la Blanche et fait un petit 3000 de sécurité histoire d’arriver haut. Je reperds presque tout mais bon… Fin de l’acte 1 : nous voila donc avec Parapentor et Fred à Dormillouse, Romu n’est pas loin derrière, les autres copains Lolo Bruno et JPT sont présumés posés ou largués…

Cap sur Briançon !!!

Parapentor bien que muet ne laisse guère planer le doûte sur ses intentions, on connait le personnage !!! Cet homme sait multiplier par 1,2 et 1,4 de manière innée. Son cerveau est fait de points CFD !!! Ainsi Parapentor le muet engage illico presto un retour sur St-André, commencé au radada pour pas perdre de temps… et peut espérer enchaîner avec une Crête de Serres, soit un vol de plus de 120 km, oops pardon un vol d’environ 150 points. Puni par une panne de GPS, son vol ne lui rapportera que 99,9 points !

J’essaie de tenter Romu, son cerveau n’étant pas constitué de la même manière, pour un Morgon et une aventure vers Briançon , il me laisse entendre que oui mais en fait il s’avère que le fourbe se ravisera à mi-transition. Comme il y a encore une justice, Rom sera posé à Thorame au retour.

Bon me voila donc avec Fred qui connaît un peu le coin et qui est partant pour Briançon. On se doûte que derrière les pilotes d’Embrun poussent et sont également tentés… Il y aura probablement de la navette possible…

3900 au Morgon, je transite vers Le Méale, crête au Sud d’Embrun. Je suis invité à passer à la suivante par Fred qui me rejoint. Nous nous retrouvons à proximité immédiate pour la première fois. Il a une vieille sellette grise dans laquelle il se balance avec fluidité, ses trajectoires sont propres, il attend toujours que je me jette en premier, il prend toujours plus de gaz, il parle volontiers à la radio…. : ça sent le pilote expérimenté, compétiteur…

Donc on fait du saute mouton dans la brise de crête en crête direction Mont-Dauphin. Là c’est impressionnant, une transition à Mach 2… On connait la puissance de la brise au niveau du sol… Par sécurité j’enroule au dessus du Rocher du Mont Dauphin en me laissant décaller et je raccroche les pentes juste au dessus des champs. C’est aussi simplissime qu’à Organya, ça monte partout en dynamique.

Il faut maintenant tourner plein Nord vers l’Argentière.

Fred enroule maintenant au dessus du Mont Dauphin et est rejoint par Christophe, qui était sensé faire l’AR Dormillouse pour ramener la voiture de leur équipe à Embrun. Fred : “Mais qu’est ce que tu fous là!!! T’as laché tes potes alors tu devais ramener leur voiture !!!” Un peu d’humour mais un effet maximum chez moi : je suis mort de rire, un fou-rire de 2-3 minutes !!! J’ai pas entendu de réponse de Christophe, j’espère qu’il ne l’a pas mal pris !

Donc les 2 gars font le plaf et pour ma part je décide de rester bas et de jouer encore à saute mouton de crête en crête aidé la par la forte brise. Outre le fait de ne pas se faire démonter par les thermiques en altitude qui rencontrent l’ouest, ça permet de profiter de la vitesse non négligeable de la brise et de son caractère laminaire.

Au niveau où la vallée se sépare en deux (Valouise vs Briançon), je déroule encore ma partition apprise avec JPT : ne pas s’engager vers Briançon, changer de rive et remonter au Nord (Têtes d’Amont et des Lauzières).

Fred me dit que le coin est connu pour être un malsain, mais je le sens plutôt bien orienté, et on arrivera pas au ras des paquerettes non plus. Une fois arrivé, après une hésitation je constate les véléités de mon aile à reculer légèrement ou à faire du surplace au dessus de la petite falaise. Avec cette vitesse de brise et un relief pas très compact avec des cassures c’est normal que ça bouge. Finalement je m’engage un petit peu à l’Est dans des éboulis au pied d’une énorme falaise de centaines de mètres (Tête d’Amont) et trouve le thermique pour m’extraire de ce coin. Il est “viril mais correct” mais le problème est qu’on n’est pas à 1000m au dessus d’une plaine… Comme dirai un grimpeur : “faut pas se mettre une boîte ici” : en remontant le long de la face, il ne faut surtout pas laisser à son aile la moindre liberté parceque secours ou pas secours, ça finirait sur la face minérale et compacte (puis ratatiné par terre!). C’est donc en 360 très très serrés que j’enroule. Plus je monte plus je me sens apaisé… Fred me suit.

Le spectacle commence vraiment maintenant. Cap sur le Mont-Blanc !!!

Pelvoux, barre des Ecrins.,. On refait plus de 3000 et on est à portée de ces montagnes mythiques, on voit les glaciers. C’est super beau. On voit aussi le Mont- Blanc, les montagnes Italiennes etc. Ce n’est toutefois pas l’heure d’en prendre plein les yeux car on est quand même bien chahutés, probablement sous le vent des plus hauts sommets du massif.

Un seul itinéraire s’impose, le Mont-Blanc !!! Avec Fred on est sur la même longueur d’onde : aller le plus loin possible en sa direction. Nous transitons donc vers le Nord-Est, moi au niveau de Serre-Chevalier et lui quelques kilomètres plus au Nord. Nous nous retrouvons instinctivement au thermique qui nous donne la possibilité de changer de vallée (sur les crêtes entre Montagne du Vallon et Grand Aréa).

Transition au niveau de Lacha : je n’arrive pas super haut mais je retrouve le thermique super agréable, le tout dans un cadre magnifique et fort peu urbanisé. C’est sur cette montagne de Challange que tout se joue et qu’on arrive à faire un plein (à bien plus de 3000 bien-sûr) qui nous permet de quitter les Alpes du Sud pour rejoindre les Alpes du Nord et la vallée de la Maurienne… Le Mont-Blanc se rapproche doucement… en tout cas on ne peut l’ignorer tellement il domine l’horizon.

Sur cette transition, on fait peut-être l’erreur ultime. Un gros nuage à la base noire nous invitait sur une trajectoire Mont-Thabor > Modane, et d’autres lui succédaient sur la même rue. Il n’était pas plus haut que large, aucun nuage dans le ciel ne surdéveloppait… Bref, fréquentable! Pour rester sur le cap Mont-Blanc, on préfére longer la ligne de crêtes Thabor> Pointe de la Sandoneire. On ne le saura jamais mais je pense qu’on aurait gagné pas mal de temps pompés par le noir sur des kilomètres… (on peut voir les rues sur les photos)

Je reste donc en bordure en jouant un peu l’aspiration mais en gardant surtout ma trajectoire décidée par rapport au sol.

Fred fait pire que moi : il chemine au relief dans les pentes vraiment peu inclinées…. Il est certes au soleil mais ça ne semble pas lui réussir. Ne te poses pas à par ici à 2500 car tu risques de marcher marcher marcher…

Je transite en franchissant la Maurienne au niveau de Francoz. Fred se refera et transitera en traversant la vallée plus à l’Ouest. Du coup en 2 décisions, je prends une avance définitive : la distance nous rendra moins coopératifs et efficaces sur les difficultés suivantes. Dommage.

Pendant la transition je prends mon téléphone et mitraille de photos.

Traversée de la Maurienne Barre des Ecrins Mont Blanc

Je remonte plutôt facilement jusqu’à la pointe du Bouchet (3300+) et refais un beau gain à + de 3500 qui m’offre Val Thorens, ses hautes crêtes (Aiguille de Peclet, Mont et Aiguille du Borgne) où je refais un ultime plein. L’ombre commence à gagner, les vallées sont moins bien orientées, les thermiques perdent de leur vigueur… En tout cas le spectacle est énorme : survol de glaciers, Mont-Blanc qui se rapproche…

J’arrive sur Bozel ou je vois des parapentes en contrebas. S’ils savaient que je viens de St-André !!! Je tape au soleil (Pointe de la Vuzelle, sous le Grand-Bec, magnifique) mais plus rien ne marche. Ca souffle encore vers la cascade mais je suis un peu trop bas… Je me reconcentre pour poser au mieux et termine le vol. Les nuages au dessus des hauts reliefs me laissent un peu d’amertume, je me prends mon manque d’expérience en pleine tête. D’ailleurs Fred arrive 20 minutes plus tard bien plus haut sur la face au soleil, il va faire le plein et aller plus loin… Non. Ca ne monte plus pour lui non plus. Il finit par me rejoindre.

Il aurait fallu être super rigoureux et rester méga haut en jouant la carte des nuages sur cette fin de vol. Posé à 7h23, un mélange de plénitude, de regrets et aussi la certitude de pouvoir voler plus vite, de pouvoir partir de plus loin (Col de Bleine) et de pouvoir arriver encore plus près du Mont-Blanc (Bourg-Saint-Maurice).

Fred se pose à côté de moi et on partage immédiatement notre joie. On se pose des questions, on se refait le vol. Il est un peu marqué, liquide (moins alimenté, hydraté et confort en vol), mais ces yeux brillent autant que les miens.

La récup’

1 bonne heure de stop pour rejoindre Albertville où le Saint Thierry d’Allevard (Chauviré) vient nous chercher, puis nous nourrir, nous loger et nous amène à Grenoble le lendemain matin. Nous y prendrons le train pour Gap où Eric (Michel) (www.parapente-controle.com) nous aménera à St-Vincent-les-Forts pour stopper vers St-André. Là après une heure, où l’on commence à désespérer arrivent d’autres Saints : des jeunes et sympas Parisiens en voiture de location qui vont à… Nice! Une bonne leçon de stop !!! Quand on se retrouve à faire du stop dans la Bléone sans jamais s’y être posé il est normal que le Dieu de l’auto-stop soit clément! Merci à tous !

Autres remerciements Fred (Nabet) : c’est vraiment sympa de partager ce vol marathon et découverte à 2. Rien que le fait d’être en radio avec quelqu’un est rassurant, mais là, c’était bien plus que cela : nous nous sommes vraiment beaucoup aidés mutuellement grâce à notre rythme similaire et notre complémentarité. Dire qu’on s’est rencontré le matin même et que l’on a parlé 5 minutes sur l’atterro! Un bien beau souvenir partagé.

Ensuite le remerciement va à tous les pilotes avec qui je vole et dont les succès et les erreurs nourrissent mon expérience. Merci particulier à Jean Paul (Tixeront) car, en plus de m’inspirer par sa régularité, sa ténacité et son talent, c’est lui qui m’a mis ce vol dans la tête! Nul doûte qu’il fera au moins aussi loin. J’espère être de la partie ce jour là ! Les photos Les photos ont été prises durant la transition au dessus de la vallée de la Maurienne.